Avocat. Élève, j'ai une cliente qui a fait la bêtise de tomber amoureuse d'un type qui lui a fait croire au grand amour au point qu'elle a payé certaines de ses dépenses en se mettant des prêts sur le dos et qui s'est faite larguer le jour où elle a commencé à refuser de payer. Tu peux me trouver une jurisprudence en escroquerie avec des faits du même genre ?
Élève. Heu... Je peux chercher mais ça me parait un peu chaud.
Avocat. Si tu as d'autres idées (misérable impudent), n'hésite pas.
Élève. Tu as vérifié les emprunts ? La responsabilité de la banque pour la mise en garde ?
Avocat. Je te rappelle que j'ai une spécialité en droit commercial alors oui j'ai vérifié et rien de ce côté.
Élève. (réfléchissant) Hum... Pas de dol possible non plus vu que le petit ami est tiers au contrat de prêt...
Avocat. Tout à fait.
Élève. Une révocation de la donation faite au boyfriend peut-être ?
Avocat. Ça ne rentre pas dans les cas du code civil et pour prouver que les paiements sont des donations indirectes il va falloir prendre de l'élan.
Élève. D'accord. Ça ne colle pas non plus avec l'abus de faiblesse sauf à considérer que l'amour rend débile (c'est une grande vérité mais juridiquement ça va se poser là).
Avocat. C'est toi le pénaliste, je te crois sur parole.
Élève. Idée géniale : quitte à démontrer des manœuvres frauduleuses, ce sera plus simple au civil qu'au pénal ! On peut faire valoir le dol sur la donation.
Avocat. Et comment tu le prouves ?
Élève. Ben, de la même façon que tu prouves les manœuvres dans l'escroquerie.
Avocat. Mais je ne peux pas les prouver.
Élève. ... Ah heu, et tu mets quoi à l'appui de ta citation ?
Avocat. Mais je ne veux pas citer. Je veux qu'il aille en garde à vue et qu'il avoue ! Je n'ai rien dans le dossier : la cliente se rappelle mal à qui elle a réglé des factures, on pourrait avoir copie des chèques mais il faudrait que les entreprises payées acceptent de montrer quelles factures ont été réglées et qui elles concernaient à l'origine, et quant aux manœuvres elles-mêmes, pour prouver qu'il l'emmenait au resto, au ciné ou qu'il lui a promis monts et merveilles, on va s'accrocher. Il n'y a qu'une solution : le faire parler.
Élève. (comprenant soudain le côté désespéré de la stratégie) Aaah d'accord !
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Merci à la solidarité des élèves avocats qui m'a permis de trouver quelques uns des superbes (bien que donc inutiles) fondements visés ci-dessus.